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15 janvier 2023 7 15 /01 /janvier /2023 06:54
Mr Diana - Genco Gülan

Mr Diana - Genco Gülan

Ce n’est pas dans un musée que je l’ai rencontrée, c’est sur internet. Elle m’a interpellée parmi toutes les autres. Je l’ai prise d’abord pour une statue grecque classique, une déesse au corps drapé comme on en croise souvent, mais celle-ci avait quelque chose de différent. Pourquoi cette statue m’a-t-elle arrêtée, celle-ci et pas une autre ?

Sa pose je crois... Pas antique du tout cette façon de regarder le monde ; debout, accoudée nonchalamment sur une petite colonne, bien campée sur une jambe, l’autre croisée devant la première en appui sur les orteils, le dos de la main contre la hanche.

Pas très raffiné pour une déesse, on dirait plus une pose de poissonnière de la place Saint-François à la grande époque ! Ou plutôt.. une pose virile… c’est ça, une pose virile. Et là, j’ai vu le visage barbu, les bras musclés, les articulations solides, le cou massif. Un homme dans un corps de femme ! Ou une femme avec une tête et des membres d’homme ! Bref, Mr. Diana.

 

Une idée lumineuse de l’artiste, Genco Gülan et une réalisation de qualité. Tout m’impressionne dans cette œuvre. Je suis à la fois fascinée par sa cohérence, admirative du talent technique du sculpteur et percutée profondément par l’impact sociétal qu’exprime Mr. Diana. Sculptée dans la tradition grecque avec son drapé aux plis mouvants qui souligne la poitrine, qui sublime la beauté classique de la silhouette, la statue cache son jeu… Genco Gülan a poussé le détail jusqu’à fabriquer l’absence d’une main, comme si elle avait été cassée et perdue, à ébrécher le nez, à faire un socle irrégulier pour donner l’impression d’une statue antique, abîmée par le temps. Le coup de burin est précis, la finesse de l’exécution implacable. On est dans l’Antiquité... si ce n’est la pose, actuelle, résolument masculine, la pose d’un homme accoudé au comptoir, droit et tranquille, un homme du peuple, un camionneur dans un bistrot routier, un gars sur un chantier, en complet décalage avec son corps ciselé de déesse et pourtant en totale harmonie.

 

Un homme-femme, une femme-homme qui nous observe, calme, serein.e, fort.e, qui nous bouscule, pacifique, convivial.e, amical.e, qui révèle l’absurdité de nos peurs devant les différences, la bêtise de nos haines intransigeantes. Comme une évidence, cet.te femme-homme, homme-femme à la chevelure joliment coiffée les abolit en silence par sa seule présence.

Une statue antique actuelle, pulvérisant les clivages, le sexisme, le genre, le temps, pour présenter un être humain, jute un être humain. Une statue tranquille qui interpelle, explose les codes de la soi-disant normalité pour libérer le point de rencontre où fondent les différences.

 

Je le-la-la-le trouve superbe et fier.e, Mr. Diana me transporte, me questionne, je l’aime

Juste envie d’aller m’accouder au comptoir pour trinquer avec elle-lui-lui-elle, et l’écouter me raconter son histoire.

 

Une belle et bonne œuvre de vivre ensemble pour toute l’humanité.

 

 

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20 février 2021 6 20 /02 /février /2021 07:11

D'après un atelier d’écriture spécial Saint-Valentin :

Écrire une lettre d'amour avec la contrainte d'un logo-rallye, en y intégrant dans l'ordre les mots suivants :

 Plaisanterie-Panache-Tracas-Mitaine-Gardien-Liquide-Excentricité-Brutalement

 

 

 

Nice le 14 février 2021

 

 

Ma Juliette

 

 

Je te kiffe grave. Ne me crois pas quand je dis que tu me gaves. C’est juste joke, plaisanterie, quoi ! Ou de la pudeur peut-être… Je sais pas dire ‘‘Je t’aime’’, j’ai pas le panache, mais j’ai le cœur à cent à l’heure quand je pense à toi.

Je sais, parfois, je suis pas tout là. J’ai des soucis, le foot, la pandémie, tout ça… Et malgré tout ça, mon plus grand tracas, c’est toi.

J’ai froid quand t’es pas là.

Je me réchauffe à t’écrire cette lettre. Une lettre pour de vrai, sans smartphone, ni Facebook, ni Instagram. Une lettre avec un stylo au bout de mes doigts glacés, au bout de mes vieilles mitaines.

Fait froid chez moi quand t’es pas là.

Alors reviens vite, j’ai le gros manque de toi.

Paraît que ça se voit que je me languis de toi. Même le gardien de l’équipe l’a remarqué : « T’as une sale gueule ! », qu’il m’a dit. Pourtant, c’est pas une lumière, tu sais ! Il a la cervelle aussi liquide que l’eau du Var ! Rien ne s’arrête dans sa tête.

Dans la mienne, c’est toi qui t’es arrêtée, installée et moi, je veux te garder. Je suis prêt à tout pour toi, même à renoncer au foot, si tu veux. Tu le crois ça !

Y a que toi pour me faire dire des trucs comme ça !

J’aimerais tant de donner la belle vie, avec des fleurs, de la fantaisie, et tout ce que tu aimes. T’es comme un fée, un feu follet et ça me plaît toute cette excentricité. T’as toujours plein d’idées, des projets… j’aimerais tant y participer…

Tu vois, j’y croyais pas, mais ça m’a attrapé, l’Amour.

Comme ça, brutalement, dès que tu as débarqué dans ma vie. Un tir au but sans rebond ni bavure !

En plein cœur.

 

Je t’aime et c’est pour de vrai.

 

Roméo

 

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12 janvier 2021 2 12 /01 /janvier /2021 05:15
   Hombre autoconstructo   de Victor Hugo Yanez Pina

Hombre autoconstructo de Victor Hugo Yanez Pina

Il était cette fois                                                                        

Dans l’atelier de l’artiste,

L’homme emprisonné.

Le mal de ce siècle,

L’Obésité

L’avait rattrapé.

 

Mais l’homme intelligent

Décide de s’évader.

Patiemment, se réaliser.

Objectif atteignable,

Chemin vers l’Idéal.                                                                                    

 

Avec force, détermination,

Il se donne les moyens de

Tendre vers la Perfection.

Comme le Pinocchio enchanté de l’enfance

La Magie de l’artiste éveille sa conscience.

 

Il se prend en mains.

Débarrassé, libéré

De ce poids morbide,

De son gros bide,

Il est vivant

Et sa Victoire éclate.

 

Belle leçon.

 

Après les chocolats de Noël

Enrobant ventres et hanches,

Faire comme l’homme de l’artiste ?

Ah ! Si c’était si simple…

 

Le régime n’est pas poésie,

La galette des Rois, si !

Mon choix et ma faiblesse,

Tant pis les grosses fesses,

Je préfère partager la brioche dorée

Avec mes amis imparfaits.

 

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20 décembre 2020 7 20 /12 /décembre /2020 05:20

 

 

Crépuscule rouge,

Tes ombres sombres s'allongent,

Et le bruit s'éteint.

 

Assise sur le vieux banc, je goûte la nuit qui monte. Dans le soir qui s’épaissit, une lueur se lève. Sa clarté nacrée irise le jardin, grimpe le long des arbres. Par-dessus la colline la lumière se rassemble en un grand disque clair.

 

Vol d'un ballon blanc

Sur le velours de la nuit

- La Lune sur le toit

 

La Lune gravit le ciel et dansent les ombres… Un arbre frissonne, moi aussi… quand, au vent léger, une souris brune s’envole sur un bruissement. Illusion ! Elle vrille sur elle-même, redevient une feuille morte à la longue tige-queue… Maintenant, tout se tait. Dans le silence immense des étoiles immobiles, c’est moi qui vagabonde sur un tapis de temps..

 

Minutes éternelles

Sur le temps qui m'échappe

- La Lune s’en va

 

Je la suis du regard. Elle croise peut-être quelques planètes inconnues cachées aux yeux des Hommes. Ne sommes-nous plus seuls ? Je rêve déjà de voisins bienveillants, d’échanges magnifiques entre toutes les Terres. Mon utopie divague… Que fais-tu de nos guerres, nos haines, nos murs, nos barrières ?

 

Sur terres et mers

l’humanité perdue se heurte

aux frontières de peur

 

Il me plaît deffleurer des mondes empathiques peuplés d’êtres mystérieux, inimaginables. Ni faune, ni flore. Autres… Ils doivent ressentir des sentiments inconnus de nos cœurs… Comment concevoir ce dont nous n’avons aucune expérience ? Saurions-nous les comprendre ? Et eux, comment nous verraient-ils, ces ET de mon âme ?

 

Planètes lointaines

abritez-vous la vie des rêves ?

Question sans réponse

 

 

 

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22 octobre 2020 4 22 /10 /octobre /2020 05:44

 

 

 

 

 

 

Rêve des femmes de Kirstine Nangala Brown  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le chemin du rêve

Temps du rêve, nébulosités…

Le chemin serpente au milieu d’éclosions colorées,

Le Rêve le suit.

La nuit agite les bulles de mémoire, gardiennes de ton sommeil.

 

L’éclat furtif

Un lézard furtif,

Les feuilles mortes crépitent sur la terrasse.

La lune se penche,

Elle éclaire le silence revenu.

 

Démons de minuit

Comme une marmite en ébullition !

Les bulles crèvent à la surface de la conscience,

Le rêve s’en nourrit,

Chasse les démons.

 

Le secret des songes

Nuit secrète refermée sur le rêve…

Sorcières dans ta tête ;

Les monstres de l’enfance

Cherchent à émerger.

 

 

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30 août 2020 7 30 /08 /août /2020 05:55

SUJET DE L'ATELIER :

Le regard plongé dans la boisson que vous êtes en train de déguster, vous avez soudain l’impression qu un lutin vous parle et vous raconte l’histoire de cette boisson. Une histoire venant des temps anciens, survolant les continents et dévoilant mille arômes et parfums, sans compter les effets, bénéfiques ou pas.
Choisissez quelle boisson vous souhaitez déguster, et laissez-vous porter par ce que vous raconte votre lutin particulier, puis retranscrivez nous tout ça.
Oh j’oubliais : depuis quelques temps tous les lutins ont l’interdiction formelle d’utiliser la lettre M. Alors votre plume aussi..

Edward Hopper's Coffee

Edward Hopper's Coffee

Quelques bulles claires sur un liquide brun et je plonge dans l’insondable. Boisson couleur de terre chaude aux effluves noisette… je vagabonde…

Soudain, dans ses volutes fines apparaît le génie de la tasse, le lutin du café. Un lutin à la peau dorée tel un grain torréfié.

Il s’appelle K’hawah, ce qui, paraît-il, signifie revigorant en arabe, il délivre la légende :

Vois-tu, dit-il, avant de déguster ce café, écoute cette histoire. Il était une fois un berger dont les chèvres étaient excitées après avoir grignoté les feuilles et les fruits d'un arbuste. Le berger a apporté une branche de l'arbuste à un prêtre qui prépara une boisson à partir des graines recueillies. Étonné par l'effet exaltant du liquide, le prêtre attribua la paternité de cette boisson à une divinité.

Ou peut-être, c’est cette histoire-ci qui est la vraie : le prêtre, après avoir observé l'agitation des chèvres qui avalaient des baies, aurait eu l'idée de faire bouillir les grains afin d'obtenir une potion qui l'aiderait à rester éveillé les nuits de prières…

Choisis la version qui te plaît..

 

Un instant de silence se distend au-dessus de la tasse, puis le lutin continue en souriant dans l’odeur apaisante du café chaud :

Tu sais, le café raconte l’histoire de la Terre ; il a traversé la Préhistoire où il a laissé quelques traces en Éthiopie, voyagé avec les pèlerins et les sultans, sauté d’un continent à l’autre, d’un océan à l’autre, pour devenir le p’tit noir français, convivial et fédérateur, que l’on partage à la terrasse... d’un café !

De l’esclavage ignoble au négoce équitable, il s’élève aujourd’hui dans l’éthique. Entends son chant de plaines vertes, de coteaux boisés, avec le soleil et la pluie qui dansent aux flûtes andines, à l’accordéon du tango, au Carnaval de Rio.

 

Je rêve en l’écoutant, envolée dans un délire à l’odeur de bois, de jute, de périples à fond de cale, de navires aventureux, de déserts arides, de villes aux fragrances d’encens, d’oranges, de santal, d’épices, de vallées plantées de caféiers, de Brésil, de Pérou, d’Afrique, d’Asie.

Café revigorant, réconfortant avec ses senteurs délicieuses de vanille, praline, tartine grillée. C’est l’odeur rituelle, quotidienne, tribale, l’odeur du foyer que je tiens entre les doigts. Il est l’éveil à l’aube, la veille de la nuit, la pause de la fatigue, la conclusion d’un repas, le plaisir en partage.

 

Les yeux rivés sur son opaque profondeur, je laisse venir l’exhalaison si particulière, quelque chose d’un peu rude, brûlé, large, rond, puissant, tonique. Une gorgée sur la langue ensoleille papilles et cœur, le feu s’active, l’essor s’étire, je suis bien. La douce âpreté persiste en bouche, le lutin du café actionne neurones engourdis et corps à l’abandon. Le jour, l’énergie pointent avec le Soleil et l’envie de la vie.

 

Effet garanti ! Le café du point du jour poursuit la grande boucle, dit le gentil lutin. Tu es continuité de la ronde.

Tu ne crois pas si bien dire, lui réponds-je. Connais-tu la suite de l’histoire ? Issu des terres tropicales, le café retourne aux terres niçoises avec ses sacs de jute pour protéger le sol et ses résidus post torréfaction, les rouleaux de pellicule, pour le nourrir. A présent, oui, la boucle est bouclée... au pied de l’olivier, dans la jardin, juste à côté… Regarde partout dans le potager...

 

Le lutin s’évapore pour aller vérifier… J’ai un peu divagué… En attendant, qui veut du café ?

 

 

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9 août 2020 7 09 /08 /août /2020 06:21

SUJET DE L'ATELIER :

Un dimanche à la campagne …
Vécu ou imaginé,
En France ou ailleurs,
En 2020 ou dans un passée, ou un avenir, plus ou moins lointain.

UNE JOURNÉE À ROQUESTERON

UNE JOURNÉE À ROQUESTERON

 

Un dimanche d'août chauffé de soleil blanc, de ciel bleu implacable, la vieille maison d’Hélène nous accueille. Discrète, elle se cache au fond d'une cour sombre, quelque part dans le village de Roquesteron. Derrière ses murs épais, la cuisine emprisonne la fraîcheur, la restitue en bien-être. Une porte fenêtre s'ouvre sur la petite terrasse ombragée de vigne-framboise. L'odeur sucrée du raisin trop mûr chatouille la langue tandis que regard se perd sur les montagnes rondes habillées de forêts.

 

Dans la fenêtre

la forêt rejoint la vigne –

Miam ! La grappe mûre.

 

Dans le silence, juste les voix de mes amies qui s'affairent au repas, le bruit des assiettes que l’on sort du placard, le tintement des couverts, le bourdonnement d'un insecte. Quelques bruissements crépitent dans les feuilles de la vigne. La chaleur assoupit le monde, la douce tranquillité restaure la vie. Sur la terrasse, le soleil s'infiltre à travers les feuillages. La table rouge, la chaise de paille et ma petite chienne tentent de lui échapper.

 

L'ombre de la vigne

danse sur la table rouge –

Quiétude d'été.

 

Midi nous réunit pour un déjeuner au champagne. Échanges, partages, rires, amitié nous rassasient autant que la pissaladière d’Hélène, le gratin de Véro, les fruits et la tourte de blettes. Nourries jusqu'au fond de l'âme, nous prolongeons la béatitude par une sieste somptueuse. Dans la chambre aux murs blancs, les persiennes entrouvertes strient les rayons de soleil ; la pénombre claire distille une sérénité heureuse.

 

Contre le mur blanc,

sobre, le grand lit sombre –

Douceur de la sieste.

 

L'après-midi, c'est la rivière turquoise qui nous invite à partager son lit. L'eau froide coule, bienfaisante, sur le pelage de ma chienne, sur les pieds de Véro, d'Hélène ; elle court sur les pierres, entre les rochers. Là, une laune profonde ; les maillots de bain sortent des sacs pour la baignade. Le froid mord les chevilles, le ventre se contracte, une grande respiration... immersion ! Détente immédiate dans le courant vif, plaisir de nager en compagnie de mes belles amies et mon adorable toutou.

 

Dans la rivière,

petits remous bondissants –

Nos pieds et pattes mouillés.

 

L'après-midi s'étire, les maillots sèchent sur nos corps rafraîchis. Conversation de tout et de rien, assises toutes les trois sur les rochers blancs… un moment de bonheur discret, si ténu qu’il effleure à peine la conscience pour s’enfouir aussitôt au doux de la mémoire…

Et puis, imperceptiblement, le soleil tiédit. Il faut partir. Il flotte comme un regret sur l'Estéron limpide. La rivière le charrie dans ses remous, le noie dans le regard de la chienne Lucy…

 

L'eau de la rivière

emporte les souvenirs –

Lucy les regarde.

 

UNE JOURNÉE À ROQUESTERON

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18 juillet 2020 6 18 /07 /juillet /2020 04:57

SUJET DE L'ATELIER :

 

LETTRE D UNE CRÉATURE A SON CRÉATEUR

La créature est un personnage de roman, ou un personnage d’une œuvre d’art.

Le créateur est l’artiste, écrivain, peintre ou sculpteur.

Ce peut être une lettre de remerciement, ou un reproche,

Ou encore une demande de changement :

Changement d’aventure ou de personnalité.

Meisje met de parel ou La Jeune Fille à la perle de Johannes Vermeer

Meisje met de parel ou La Jeune Fille à la perle de Johannes Vermeer

Cher Johannes Vermeer,

 

J’ai perdu mon identité. Je suis figée depuis si longtemps dans ce tableau, avec mon turban bleu et ma perle éclatante, que j’ai oublié mon nom.

On m’appelle juste La Jeune Fille à la perle.

 

Certains disent que je suis votre fille aînée, d’autres, votre fille cadette, d’autres encore, l’une de vos servantes… Nul ne le sait en fait. Même plus moi ! Il ne me reste que cette pose à l’italienne, le visage tourné sur l’épaule, mon regard qui vous scrute et la question muette sur mes lèvres entrouvertes :

Qui suis-je ?

Puisque cette question restera à jamais sans réponse, je m’autoproclame votre fille aînée !

 

Et donc, mon cher créateur à tous les sens du terme, je m’autorise dès à présent à te tutoyer – pratique en vogue au XXIe siècle d’où je t’écris cette lettre – et à t’appeler papa.

Tout ça pour te dire, petit papa chéri très grand peintre, que je me trouve vraiment belle sur ce portrait. Tu aurais pu être un grand photographe portraitiste ! C’est vrai, tu ne connais pas les photos. Moi, si ! On m’a tiré le portrait plein de fois, une vraie star !! Rien à envier aux reines du cinéma ! C’est vrai, tu ne connaîs pas non plus le cinéma… Mais tu connais les livres. Sais-tu qu’un roman inspiré par moi a été écrit à la fin du XXe siècle ? Et de ce livre est né un film. Je suis devenue une héroïne littéraire et une actrice !

Finalement, d’avoir perdu mon identité ajoute un mystère propice à l’imagination… J’adore !! Tu as bien fait de créer cette énigme...

 

Grâce à toi, je suis célèbre, éternellement jeune et belle, douce et fraîche, avec mon regard lumineux, ma bouche innocente. Alors, si je t’écris aujourd’hui, c’est pour te remercier de m’avoir donné la vie. La vie réelle dans notre belle ville de Delft au XVIIe siècle, la vie éternelle sur la toile – celle du peintre et celle d’internet, encore une technologie du temps présent – et, par le truchement d’autres artistes, la vie imaginaire dans un roman et un film. Je peux donc dire que j’ai vraiment bien réussi mes vies !

 

Immobile dans mon éternité, je pose maintenant ma plume imaginée pour te rejoindre là où tout a commencé, dans le tableau La Jeune Fille à la perle.

 

Merci Johannes Vermeer.

 

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9 juin 2020 2 09 /06 /juin /2020 05:43

SUJET :

On parle beaucoup de l'après Covid, et que le monde va changer.
Grace à la renommée grandissante de votre intelligence supérieure, vous êtes nommée ministre au tout nouveau ministère de la transition sociétale, écologique et économique. Au prochain Conseil de ministres, vous devez présenter votre plan pour une économie harmonieuse, une écologie respectueuse de la nature et une société de bien-être. Au travail !

 

***

 

Madame Inge, première ministre, mesdames les ministres de l’atelier,

 

 

Non, décidément, je ne suis pas faite pour être ministre ! Je me vois dans l’obligation de refuser ce poste prestigieux. Vous avez trop présumé de mon intelligence, mes neurones n’ont pas suivi.

Présenter un plan cohérent de transition sociétale est définitivement hors de ma portée.

 

La crise du coronavirus a mis en évidence des inégalités inacceptables, des confinements insalubres, des promiscuités dangereuses, des individualismes forcenés, une mondialisation nocive, une finance tyrannique , une consommation exacerbée. Un monde qui a perdu tout bon sens, un monde de démesure, un monde où il devient urgent de proposer une autre façon de vivre, voire de réapprendre à vivre.

 

Partant de ces constatations, j’aurais pu vous parler de croissance, décroissance, nucléaire, énergie verte, dette, salaire universel, nationalisation, impôt sur les grandes fortunes, évasion fiscale, villes éco-intelligentes, sol vivant, arboriculture, agriculture de proximité, agriculture urbaine, partage, solidarité..

J’aurais pu reprendre les diverses idées émises par les divers partis politiques pour sauver le monde, mais comme tout a été plus ou moins dit, et que je n’ai pas d’idées neuves, ni de connaissances suffisantes pour prétendre à des solutions, j’avais envisagé de présenter un programme poético-utopique bien que le concept même d’économie harmonieuse me semble lui-même réellement utopique !

 

Las ! Même un plan délirant, farfelu, avec des rêves et des rires, des arbres et des oiseaux dessus, et leurs chants pleins de trilles, des animaux heureux, des gens heureux, du soleil, des pluies douces, des poissons d’argent, de l’argent propre et bienveillant, des fleurs délicates, des usines fleuries, des maisons épanouies, des métiers de bonheur, des sourires voltigeants, des amis, des amants, de la musique et des livres, des promenades enchantées, des lutins et des fées, des étoiles dorées, de l’air pur, des brises d’été, des plages blanches, des mers bleues, des jardins potagers, partagés, des fruits trop sucrés, des gâteaux chocolatés, des repas arrosés, enfin, tout ce qui est indispensable à la bonne vie, hé bien, même ce plan-là, je suis incapable de l’organiser !

Il me reste de ce concept une liste hétéroclite, un méli-mélo embrouillé, un désir qui pointe, une aspiration illuminée, rien de construit, cohérent, rationnel et solide. Les choses s’échappent en volutes d’arc-en-ciel, insaisissables.

 

Alors, ne comptez pas sur moi pour vous tirer d’affaire, je ne sais pas. Je me désiste en faveur de quelqu’un qui saura mieux que moi vous décrire un avenir désirable.

Cliquez sur le lien ci-dessous pour l’écouter :

Je vous remercie de votre amicale attention.

 

MC

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20 mai 2020 3 20 /05 /mai /2020 05:43
DERRIÈRE LES PERSIENNES

Vu de ma fenêtre, les persiennes vertes, à peine entrouvertes

Et le jour naissant qui passe à travers.

Je sais la rue, en bas, le store de la boulangerie couine,

Je sais l’odeur des croissants chauds qui, peut-être, viendront jusqu’à moi…

 

Sans ouvrir la fenêtre, je sais déjà les gens ;

Il y a cette mère qui accompagne ses enfants,

L’école n’est pas loin, ça braille au bout de la rue,

Ça réveille le quartier, ces gosses et leur boucan..

 

Et puis, y a ces quidams, les pressés, les stressés, les énervés

Les piétons, les trottinettes, les voitures et leurs klaxons ;

Lucy sur son vélo, son sac en bandoulière,

Sans ouvrir la fenêtre, je sais déjà tout ça.

 

Sans ouvrir la fenêtre, je peux imaginer la rue

Comme un jardin aux fleurs de Paradis,

Les abeilles, les oiseaux, les papillons, les fruits,

Le parfum du jasmin par-dessus le diesel..

 

Sans ouvrir la fenêtre, mon rêve peut advenir,

Franchir les persiennes closes pour habiter ma vie, ma rue, ma chambre.

Derrière les volets, je mets ce qui me plaît, une autre réalité,

Celle qu’est dans ma tête, et ça, personne ne peut me l’enlever

Tant que je n’ouvre pas la fenêtre.

 

Sans ouvrir la fenêtre, je peux même voir la mer,

Le soleil sur les vagues, l’écume et les poissons,

Je peux voir les bateaux, leurs voiles blanches, au loin,

Et le port où le vent chante avec les marins.

 

Et puis, si j’ai envie, je peux voir la montagne.

Tiens, voilà un chamois, là-haut, sur le sommet.

Sans ouvrir la fenêtre, je peux tout décider,

Mais…

 

Le bruit de la rue, un gros camion qui passe,

Et Ludo qui gueule : ‘‘Hé, Manu, ! Tu descends ?’’

Pulvérisent le rêve…

Derrière les persiennes aux airs pourtant champêtres

Y a la ville qui bouge, y a la vie, y a les gens.

Alors j’ouvre la fenêtre pour crier :

‘‘Oui, Ludo, je descends !’’.

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